Le Cocktail est un passe-temps qui consomme beaucoup de temps, de place, et d’argent.
Beaucoup aimeraient se lancer mais n’ont ni de pièce dédiée, ni de budget illimité pour quelque chose de “non nécessaire” et d’alcoolisé.
On peut avoir un mini-bar avec beaucoup d’allure en équipant une simple desserte ; la question est “quelles bouteilles mettre dessus ?”.
Je me suis lancé le défi, pour un ami qui ne part de rien et qui souhaite se constituer un mini-bar à domicile, de lui donner le “starter pack” des bouteilles à acquérir, pour un budget de 200 euros.
le prix d’une bouteille
Avec sa part importante de taxes (Droit d’Accise, Cotisation Sécurité Sociale, TVA), il est très (trèèès) difficile de trouver une bouteille de spiritueux qui tienne la route à moins de 20€.
Sur les 20€ (TTC) que vous payez pour une bouteille de 70cl titrant à 40% alc.vol :
– 4€ de TVA (20%)
– 5,23€ d’accise (1866,52€ par hl/ap)
– 1,68€ de CSS (599,32€ par hl/ap)
Soit plus de la moitié (10,91€) de taxes.
Si le montant de la TVA dépend du prix de vente H.T, les frais d’Accises et de Sécurité Sociale seront les mêmes pour tous les spiritueux à 40%.
Si vous trouvez (et achetez) une vodka à 12€, c’est que son prix de vente H.T n’est que de 2,69€ (bouteille, bouchon et étiquette compris) …
(12,00€ – 2,4€ de TVA – 5,23€ d’accise – 1,68€ de CSS = 2,69€)
L’idée n’est pas de faire un bar qui fait pitié avec des produits au rabais. C’est pourquoi, pour respecter les 200€, il vaut mieux bien réfléchir aux bouteilles qui nous sont nécessaires, et privilégier la qualité à la quantité.
9 bouteilles, près de 30 cocktails
Une bouteille de vodka c’est super ! Allongée de Ginger Beer ça donne un Moscow Mule ; allongée de Jus de Tomate ça donne un Bloody Mary ; secouée avec du jus de citron et du sucre ça donne une Caïpiroska.
Une bouteille de Scotch c’est une autre affaire. À part le fameux whisky-soda, le nombre de cocktails qui viennent en tête sont plus rares.
Vous allez marmonner “c’est parce que la vodka ça sert à être mélangée alors que du whisky écossais c’est fait pour être dégusté, gnagnagna”.
Dans l’absolu, c’est pas faux. Mais je vous jure que vous n’avez pas envie de déguster un Clan Campbell, Label 5, William Peel ou autrs J&B ; et quitte à n’avoir que 20€ à mettre dans une bouteille : prenez une bonne vodka à mélanger plutôt qu’un mauvais whisky à siroter en grimaçant.
Donc, si vous permettez, je reprends :
Vous aurez moins de 10 bouteilles (respectables) avec 200€.
Je répète : vous aurez moins de 10 bouteilles avec 200€.
Moins de 10 bouteilles, ça sous-entend des choix.
Un bon exemple de choix c’est “vodka ou scotch ?”
Ma réponse à cette question est donc : “la vodka, car elle est plus polyvalente et vous permettra de faire plus de boissons qu’un scotch”
Les 9 premières bouteilles que je vous conseille d’acquérir pour commencer votre bar à cocktail à domicile sont les suivantes :
1. vodka non aromatisée
Je la cite en premier pour l’aspect symbolique, car elle est arrivée sur la scène cocktail extrêmement tard par rapport aux autres spiritueux.
Si le mot “cocktail” existe depuis le début du 19ème siècle, la vodka ne s’est démocratisée que dans les années 1940 avec la marque Smirnoff et le cocktail Moscow Mule. Après ça, ceci-dit, ça a été le boom.
La vodka n’a pas de goût (et c’est voulu). Cette neutralité, longtemps critiquée, est devenue après la seconde guerre une force : une preuve de pureté et de sophistication.
Donc, vous l’avez compris, ne commencez pas avec une vodka aromatisée à l’herbe de bison ou autre gri-gri marketing.
Je vous conseille une bouteille de 70cl de la vodka suédoise Absolut titrant à 40% alc.vol. à un peu plus de 20 euros.
20,90€ sur Urban Drinks
22,50€ sur La Maison du Whisky
19,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Il existe des vodkas moins chères, mais elles titrent souvent à 37,5% alc. (et payent donc moins de taxes en vous vendant plus d’eau).
À l’inverse, rien ne sert de lâcher un cinquième du budget dans une vodka ultra premium comme Grey Goose, qui coûte le double d’Absolut : elles sont toutes les deux faites à partir de blé et titrent toutes les deux à 40% alc.
Bloody Mary :
6cl vodka, 12cl jus de tomate, 1,5cl jus de citron, tabasco, sel de céleri.
Caïpiroska :
6cl vodka, 1,5cl sirop de sucre, 1,5cl jus de lime (citron vert), glace pilée.
Moscow Mule :
6cl vodka, 18cl soda giner beer, une tranche de lime, Angostura Bitters.
2. ron (rhum) hispanique
Les spiritueux de canne à sucre ont différents noms selon leur tradition.
En français, ils sont étiquetés Rhum, en anglais Rum et en espagnol Ron.
Si on devait généraliser, ils présentent de petites spécificités :
– les français font des rhums “agricoles” à partir de jus de canne à sucre.
– les anglais font des rhums “traditionnels” à partir de mélasse de canne.
– les espagnols font des rhums “traditionnels” plus légers que les anglais.
Pourquoi les “rons” sont-ils plus légers ? Car ils sont distillés de manière continue, à très haut degré, dans des alambics modernes à colonnes.
Les “rums” sont aussi issus de mélasse, mais les alambics britanniques sont souvent plus traditionnels, pour ne pas dire rustiques.
Il existe une myriade d’exceptions ! Il s’agit de lignes grossières !
Donc, vous l’avez compris, ne commencez pas avec un rum jamaïcain très fort et très puant : vos mojitos auront un goût inhabituel.
Je vous conseille une bouteille de 70cl du rhum porto-ricain Bacardi titrant à 37,5% alc.vol. à moins de 20 euros.
18,90€ sur Urban Drinks
19,00€ sur La Maison du Whisky
18,95€ sur Drankdozijn
Pour un vrai rhum cubain à 40%, passez chez Havana Club, mais c’est 21€.
Tant que le rhum est pur, clair et léger : vous aurez de quoi vous amuser.
Daïquiri :
6cl ron, 3cl jus de lime (citron vert), 1,5cl sirop de sucre.
Pina Colada :
6cl ron, 9cl jus d’ananas, 3cl crème de coco, 1,5cl jus de lime.
Mojito :
6cl ron, 1,5cl de lime, 1,5cl sirop de sucre, 7 feuilles de menthe, 3cl soda.
3. london dry gin
Le gin n’est autre qu’une vodka aromatisée à la baie de l’arbre Genévrier.
Un alcool pur, re-distillé avec différents aromates dont la fameuse baie (qui est en fait un cône, comme une pomme-de-pin, mais qu’on appelle “baie” à cause de son aspect “charnu”).
Le gin sert depuis longtemps dans les cocktails. Son ancêtre hollandais, le Genièvre, était déjà très prisé au 19ème siècle. La version anglaise, plus sèche, plus pure et plus moderne à pris le marché à l’aube de 20ème siècle.
On peut situer le point de bascule en 1888, en comparant les registres d’importation de la ville de New York :
En 1887 sont importés 145’000 gallons de “holland gin” et 5’000 gallons de “english gin”.
En 1888 sont importés 75’000 gallons de “holland gin” et 107’000 gallons de “english gin”.
Et après, la tendance ne s’est plus jamais inversée.
Donc, vous l’avez compris, ne commencez pas avec un gin édulcoré de type Old Tom ou une version contemporaine reléguant le genièvre au second plan comme chez G’Vine ou Christian Drouin. Vous voulez un London Dry Gin à l’ancienne : sec et fort en genièvre !
Je vous conseille une bouteille de 70cl du gin écossais Tanqueray titrant à 43,1% alc.vol. à un peu plus de 22 euros.
22,90€ sur Urban Drinks
26,90€ sur La Maison du Whisky
21,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Beefeater est aussi une valeur sûre, mais Tanqueray à Tom Nichol en distillateur.
Un Bombay Sapphire, par exemple, ne donnera pas un aussi bon Negroni que le Tanqueray, car il est moins sec et plus floral.
Gin Tonic :
6cl gin, 18cl tonic.
Bee’s Knees :
6cl gin, 2,25cl jus de citron, 0,75cl jus d’orange, 1,5cl miel.
Clover Club :
6cl gin, 2,25cl jus de citron, 1,5cl sirop de framboise, 1/2 blanc d’oeuf.
4. liqueur d’orange
Grand Marnier ou Cointreau ?
Curaçao ou Triple Sec ?
Le monde des liqueurs à l’orange est plein de zones d’ombres.
Au début, la différence entre “Curaçao” (nom-hommage à l’île des Antilles d’où venaient les oranges) et “Triple Sec” (triple distillation, moins de sucre) venait de l’alcool de base.
Un Curaçao, comme Grand Marnier, avait pour base le Cognac.
Un Triple-Sec, comme Cointreau, avait pour base l’alcool neutre.
PS : voilà pourquoi il est inscrit “triple-sec” sur la bouteille de Grand Marnier Cordon Jaune, car il a une base d’alcool neutre.
Aujourd’hui, il existe des curaçaos bleus au colorant E133, et le terme tripe-sec est utilisé pour la première pauvre liqueur d’orange frelatée qui arrive sur le marché. Même Cointreau se contente d’écrire “l’unique” derrière son nom, sans se revendiquer comme triple-sec.
Donc, vous l’avez compris, il est question dans tous les cas de liqueur d’Orange. Une liqueur d’Orange à 40% alc. vol attention !
Je vous conseille une bouteille de 70cl de l’Unique Cointreau d’Angers à 40% alc.
22,90€ sur Urban Drinks
26,90€ sur La Maison du Whisky
24,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Cosmopilitan :
4,5cl vodka, 2,25cl triple-sec, 3cl jus de cranberry, 1,5cl jus de lime.
Maï Taï :
6cl ron, 1,5cl triple-sec, 2,25cl jus de lime, 1,5cl sirop d’orgeat.
White Lady :
4,5cl gin, 2,25cl triple-sec, 2,25cl jus de citron, 1/2 blanc d’oeuf.
5. cognac vs
Le fleuron français, qui rayonne à l’internationale alors qu’il est boudé chez les premiers concernés.
Je sais que c’est étrange de proposer un Cognac dans une liste très restreinte d’ingrédients, avec budget limité. Mais j’ai dis en introduction que votre bar-maison aurait de l’allure !
Les gens n’ont pas peur de se saigner pour un whisky écossais âgé ou une Chartreuse quand il s’agit de gâter leurs invités au moment du digestif. Pourquoi ne pas tout simplement leur payer un cognac ?
C’est aussi franchouillard que la Chartreuse, et ça leur évitera un pic glycémique. C’est aussi boisé qu’un scotch, et plus local.
Le Whisky est le cognac du con
Pierre Desproges
Donc, vous l’avez compris, on s’achète une bouteille un peu plus chère que les autres. Mais c’est pour la bonne cause.
Je vous conseille une bouteille de 70cl de Courvoisier VS à 40% alc. VS, ça signifie Very Special, est c’est le type de cognac le plus jeune.
37,90€ sur Urban Drinks
42,90€ sur La Maison du Whisky
32,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Horse’s Neck :
6cl cognac, 18cl ginger ale, 2 traits bitters.
Sidecar :
4,5cl cognac, 3cl triple-sec, 1,5cl jus de citron.
Brandy Flip :
6cl cognac, 1,5cl sirop de sucre, 1 oeuf entier.
6. whiskey américain
En Écosse, au Japon et au Canada, on écrit “Whisky”.
En Irlande est aux États-Unis, on écrit “Whiskey”.
Ici, il est question de WhiskEy.
Le Whiskey américain n’est pas fait avec une majorité d’orge malté comme c’est le cas en Europe. Là-bas, on mixe différents céréales (maïs, seigle, blé, orge, etc.) selon le goût recherché.
Le type de whiskey américain le plus connu est le Bourbon, et il contient dans sa mashbill (recette des céréales) au moins 51% de maïs.
La marque américaine la plus connue, Jack Daniel’s, est estampillée “Tennessee Whiskey” et non “Bourbon Whiskey” ; mais pourtant sa mashbill contient aussi une majorité de maïs : sa seule différence réside dans une filtration au charbon de bois (The Lincoln County Process).
Je vous conseille une bouteille de 70cl de Buffalo Trace à 40% alc.
C’est moins connu de Jack, un peu moins cher, et très très bon.
26,90€ sur Urban Drinks
27,90€ sur La Maison du Whisky
25,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Old Fashioned :
6cl whiskey, 1cl sirop de sucre, 3 traits bitters.
Whiskey Sour :
6cl whiskey, 3cl jus de citron, 1,5cl sirop de sucre.
Mint Juelp :
6cl whiskey, 1,5cl sirop de sucre, 1 brin de menthe, glace pilée.
7. vermouth doux (ou italien)
Le Vermouth est entre le Vin et le Spiritueux.
Un vin auquel on ajoute de l’alcool distillé pour sa conservation est appelé “vin muté” ou “vin fortifié”.
Le Porto portugais, le Xérès espagnol ou les VDN français sont des vins mutés.
Le Vermouth ne se contente pas d’être muté ; il est aussi “aromatisé”.
Il appartient à la grande famille des Apéritifs à Base de Vin (ABV) et à sa sous-catégorie des vins aromatisés comme le Quinquina et l’ Americano.
Vermouth est un mot allemand qui signifie “absinthe”. Est pour cause, le vermouth est entre-autre aromatisé à l’armoise (ou grande absinthe).
Il existe deux grandes familles de Vermouth :
– Vermouth Doux, Sweet, Italien.
– Vermouth Sec, Dry, Français.
Les deux ont une importance primordiale dans l’histoire des cocktails.
Avec le Vermouth Dry vous pourrez faire le Dry Martini de James Bond.
Avec le Vermouth Sweet vous pourrez faire plein de trucs encore mieux.
Donc, vous l’avez compris, il est question d’un Vermouth Doux !
La bouteille à beau être rouge, il a aussi une base du vin blanc, c’est le caramel servant à l’adoucir qui lui donne sa teinte rouge.
Je vous conseille une bouteille de 75cl de Vermouth Rouge Dolin, de Chambéry, à 16% alc.
Si vous pouvez un jour vous payer de l’Antica Formula, n’hésitez pas, mais je fais un compromis entre ça et le Martini Rosso de GMS.
15,90€ sur Urban Drinks
17,90€ sur La Maison du Whisky
9,45€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
Manhattan :
6cl whiskey, 3cl vermouth doux, 2 traits bitters.
Boulevardier :
4,5cl whiskey, 3cl vermouth doux, 3cl aperitivo rouge italien.
Vieux Carré :
3cl whiskey, 3cl vermouth doux, 3cl cognac, 1 traits bitters.
De quoi doubler, d’un coup, vos recette au whiskey.
8. aperitivo rouge italien
En Italie, aucune loi ne tranche sur la différence entre Aperitivo et Digestivo. Leur nom respectif donne un indice quant au moment où les consommer : en Apéritif pour l’un, en Digestif pour l’autre.
Mais lequel est lequel ?
De manière générale, bien que toutes ses liqueurs italiennes soient amères ; il est convenu que le bitter aperitivo est moins amer que l’amaro digestivo.
Un proverbe italien dit qu’un Aperitivo à la couleur rouge d’un couché de soleil, tandis qu’un amaro est sombre comme la nuit profonde.
Donc, vous l’avez compris, il est question ici d’un amer rouge pour l’apéritif. L’Aperol et le Campari sont de ceux-ci.
Savez-vous d’ailleurs d’où vient leur teinte rouge ? D’un petit insecte appelé cochenille (mais le groupe Campari l’a remplacé par un colorant).
Je vous conseille une bouteille de 70cl de Bitter Campari à 25%.
L’Aperol à 12,5% fera aussi l’affaire, bien que beaucoup plus sage.
20,50€ sur Urban Drinks
24,90€ sur La Maison du Whisky
17,95€ sur Drankdozijn (en promo quand j’écris ces lignes)
PS : Un spritz au Campari marche aussi très bien.
Negroni :
3cl gin, 3cl vermouth doux, 3cl aperitivo rouge italien.
Milano Torino :
4,5cl vermouth doux, 4,5cl aperitivo rouge italien.
Americano :
3cl vermouth doux, 3cl aperitivo rouge italien, 9cl eau pétillante.
9. bitters concentré aromatique
Le sel et le poivre des barmen.
Vous savez ? Ces petites fioles d’apothicaires !
Considérés comme impropres à la consommation en tant que tels, quelques gouttes dans vos verres en changeront la composition, et feront passer votre verre de “bon” cocktail à “incroyable” cocktail.
Je vous conseille une fiole de 20cl d’Angostura bitters, le classique, celui avec son bouchon jaune et son étiquette trop grande.
18,90€ sur Urban Drinks
18,00€ sur La Maison du Whisky
14,95€ sur Drankdozijn
PS : goutte par goutte, ça vous fera très longtemps.
verdict : défi relevé avec succès ?
Malheureusement, pas tout à fait …
Sans promotions, j’arrive à un panier de 205€ chez le moins cher.
Pas loin, mais pas tout à fait.
Les 200€ sont jouables en comparant et guettant les promos.
Il se trouve qu’un des trois sites que j’ai comparé pour l’exercice propose de petites ristournes sur bon nombre de ses bouteilles, ce qui m’a aidé à ne pas dépasser.
187€ c’est pas mal pour 9 bonnes bouteilles.
La prochaine fois, on regarde les 200€ supplémentaires à investir pour étendre ce joli bar !
Santé chers Bibules
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